Paris porté à l'écran : que retiennent les cinéastes?
projet intégral d'un TPE de deux élèves de 1ere Littéraire de la Folie Saint James à Neuilly

Charade de Stanley Donen



1963 - Etats-Unis - 113 min

Charade est un long-métrage américain sorti en 1963 et réalisé par Stanley Donen qui est alors spécialisé dans la comédie musicale (Singing in the rain, 1952) et qui dans ce film s'attelle à un tout autre registre : la comédie policière. Charade a la particularité d'osciller entre le suivi de l'intrigue avec une succession d'assassinats tous plus mystérieux les uns que les autres et la veine comique dont fait preuve le jeu d'acteurs servi par un duo aussi talentueux que populaires pour l'époque à savoir Audrey Hepburn (Diamants sur canapé) et Cary Grant (La mort aux trousses), chacun jouant le partenaire comique et de coeur de l'autre.

Synopsis
Regina Lampert (Audrey Hepburn), en instance de divorce, retrouve son appartement parisien sans dessus dessous et apprend la mort de son mari. L'inspecteur Grandpierre lui explique que son époux avait détourné pendant la guerre un magot destiné à la Résistance française. Ses anciens complices ont dû vraisemblablement l'abattre, voyant qu'il voulait profiter seul du trésor. Suspectée par ses derniers, "Reggie" ne sait plus où donner de la tête. Même Peter Joshua (Cary Grant), un séduisant célibataire rencontré aux sports d'hiver, semble être impliqué dans cette affaire.

Paris une vitrine attractive au service du film
Charade a l'avantage d'être uniquement tourné en décors réels. Beaucoup de scènes sont filmées en extérieur mais nous sommes encore très loin du cinéma contemplatif et vagabond de la Nouvelle Vague : aucune importance particulière n'est conféré à l'environnement extérieur dans lequel évoluent les personnages, Charade est un film d'action, l'intrigue doit se poursuivre au détriment d'un intérêt plus appuyé pour la ville en question. Ce n'est plus le Rohmer qui oublie son héroïne pour aller filmer les terrasses des cafés mais bien un réalisateur ayant trouvé que Paris constituait le plus bel écrin qui soit pour son héroïne et l'épanouissement de son intrigue.
L'exceptionnelle richesse et variété de lieux figurants dans le film nous permettent de dire que Paris possède tout de même un rôle de premier plan, chaque rebondissement servant à en dévoiler toujours un peu plus de la ville. (vidéo des rendez-vous pris avec Hepburn). S'agissant du service rendu de la capitale au film, la curiosité (réciproque) qu'on toujours témoigné les américains pour le folklore sinon le chic parisien se voit ici largement satisfaite, Paris est l'argument de vente idéal, l'arrière-plan inespéré pour une comédie romantique et qui plus est américaine.

Hommage et clichés
Le Paris de Charade est un Paris populaire vu depuis la chambre d'hôtel de riches américains oisifs et qui dépourvu de sa notion sociale semble ne posséder que des charmes et se résumer à son marché des Halles, à son marché aux timbres et au Guignol des Champs-Elysées, c'est un Paris touristique, un Paris de surface. Le réalisateur use et abuse des images préconçues qu'inspire la capitale et c'est donc avec Peter Joshua nommé "président" chargé de distraire Reggie qui est alors coincée dans une ville qu'elle ne peut quitter au risque d'y perdre la vie que le parcours touristique de la capitale peut commencer. Le couple se voit presque contraint de visiter Paris pour le plus grand bonheur des spectateurs, enchaînant les plans-séquences dans des lieux fameux de la capitale, le duo se promène donc le long des quais de Seine, c'est l'occasion d'une scène ou "Reggie" fait allusion à des oeuvres emblématiques ayant pour décor Paris : le film de Vincente Minneli Un américain à Paris et le roman de Victor Hugo Le Bossu de Notre-Dame. Cette scène se présente comme un évident hommage à Paris où chaque parcelle de la ville lumière semble déjà avoir été célébrée, filmée, décrite, chantée, les personnages sentant trainer derrière eux tout le poids historique et culturel d'une ville portée au pinacle un nombre incalculable de fois.

Paris prestige
Si le Paris populaire de Charade se limite à quelques arrondissements très peu représentatif du quotidien des parisiens c'est que Reggie est une américaine nantie comme en témoigne son vide mais non moins gigantesque appartement qu'elle délaissera pour un hôtel 2 étoiles ainsi que le train de vie qu'elle mène à Paris. N'étant que de passage mais ne pouvant partir, elle se retrouve enfermée dans la plus belle prison qui soit.
Soulignons aussi qu'Audrey Hepburn est tout au long du film habillée par Hubert de Givenchy, ami de l'actrice, éminent couturier et l'une des figures emblématiques de l'élégance à la française, l'actrice incarnera la marque dès 1953 s'affichant avec les tenues du couturier tout au long d'une série de film allant de Sabrina à Deux têtes folles en passant par Diamants sur canapé et Charade. Cela prouve bien la décision qu'a prise Stanley Donen de filmer un Paris prestigieux, fantasmé, où tous ses emblèmes seraient célébrés et réunis dans un même film : sa couture, ses amoureux, ses cafés, ses cathédrales (Notre Dame), ses théâtres (la Comédie Française), ses marchés, ses péniches, ses toits, ses cabarets, son fleuve, son métro et son architecture. Stanley Donen ne se soucie ni de la vraisemblance de son histoire ni du réalisme des décors, méritant autant son statut de cinéaste que celui de storyteller.


Lieux filmés :
- Les Halles la nuit qui était encore un marché exporté à Rungis en 1969 soit 6 ans après le film.
- le Palais Royal
- la Comédie Française
- l’Institut Médico-légal de Paris
- le métro Saint-Jacques
-Hôtel 2 étoiles Saint-Jacques
- le siège d’American Express
- les Bateaux-Mouche
- le Port de la Tournelle
- le bâtiment de l’UNESCO
- le marché aux timbres
- le Guignol des Champs-Elysées
- l’Ambassade Américaine, Place de la Concorde.

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